objets de couture anciens : ciseaux ouvragés, bobines de fil et de dentelle

Victorine d’Amérieux reposa clef et tournevis sur son établi, découragée. Le grand concours annuel de l’académie de mécanique éthérique aurait lieu dans une semaine, et elle n’était toujours pas prête.

Le mécanaute qu’elle avait réussi à construire était une réussite : un mannequin doté d’immenses ailes qui lui permettaient de planer dans les airs, et d’un mécanisme de transmission éthérique pour en contrôler les mouvements depuis le sol. Tous les essais de Victorine s’étaient révélés concluants.

Malheureusement, il manquait un élément central : l’esthétique. Le concours primait tout autant la beauté des créations que leur côté novateur, et en l’état, son mécanaute n’était qu’un amas de rouages et de morceaux d’ivoire qui n’avait rien de plaisant.

C’est d’humeur morose que Victorine alla retrouver sa petite sœur, Héloïse, qui brodait tranquillement à l’ombre de la tonnelle. L’inventrice en herbe se laissa lourdement tomber aux pieds de sa sœur, qui dégagea aussitôt ses jupes avec un cri.

« Victorine ! Attention. Ta blouse est tâchée de graisse. »

« Pardon, Héloïse. Que fais-tu ? »

Victorine bascula la tête en arrière pour jeter un œil au cercle à broder qu’Héloïse lui tendait. Elle avait l’habitude des fleurs que sa sœur créait à l’aide de points complexes, mais cette fois le tissu était orné d’étranges objets moirés.

« Qu’est-ce que c’est ? »

« Des élytres de scarabée. Père me les a ramenés du royaume de Siam. C’est joli, non ? »

« Ces reflets verts sont superbes ! »

Victorine attrapa le cercle à broder pour le soupeser. Ces élytres étaient légers. Serait-il possible…

« Ces élytres, combien en as-tu ? »

« Oh, toute une caisse. Pourqu… Oh ! »

Héloïse, si elle préférait des loisirs plus convenables que ceux de Victorine, n’en était pas moins intelligente ; elle avait déjà compris. Elles échangèrent un sourire.

« Tu auras le temps, en une semaine ? »

« Si on couvre juste les ailes, oui. »

« Je t’en offrirai d’autres, promis. »

« Tu as intérêt. Une fois que ton mécanaute aura gagné le prix, tout le monde va se les arracher ! »

Victorine n’avait jamais été aussi enthousiaste à l’idée de faire de la broderie.

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.